Je suis d’ailleurs surpris de voir que la plupart des morceaux reposent plus sur le duo basse/claviers que sur l’habituel duo guitare/claviers qu’on trouve d’habitude sur ce type d’AOR. Il faut dire que la débauche de claviers est souvent moquée dans le son des années 80, quand c’est bien utilisé, c’est absolument fabuleux. Notamment sur le beaucoup trop sucré « Golden Swansdown », qu’on croirait tout droit sorti d’un best of de SURVIVOR ou de FOREIGNER. Ou encore les couplets de « Taurus », qu’on imagine sans aucun problème dans la bande originale de « Footloose » ou « Flashdance », au moment où l’un des personnages principaux, confronté à un dilemme capital pour le reste de sa vie décide de claquer sa danse la plus stylée, parce qu’en 1985 tout peut se résoudre par une chorégraphie passionnée.
On pourrait croire la recette éculée, mais en se renouvelant juste ce qu’il faut, la formation arrive à nouveau à surprendre. Les influences de YES, KANSAS et BOSTON, sont ici mises en retrait pour un résultat encore plus grandiloquent et radiophonique que son prédécesseur : « Divinyls » est un tube absolu, immédiat et imparable, « Golden Swansdown » est une de ces ballades sirupeuse à souhait, tellement kitsch qu’elle en devient géniale, « Sister Mercurial » et sa rythmique irrésistible vous restera dans les oreilles pendant des jours, « If Tonight’s Our Only Chance » est un hymne porté par un refrain fédérateur et épique comme il faut.
Même les morceaux un peu plus faibles que sont « Carmencita Seven » ou « Curves », possèdent leur petit truc bien particulier qui les rend appréciables (pour le premier, sa batterie, pour le second ses claviers chelous à chaque fin de refrain).
Mais la pièce maîtresse de l’ensemble reste le magistral « Transmissions », délicatement mélancolique, ou la guitare se manifeste au moment parfaitement opportun et qui monte en puissance jusqu’à exploser dans un solo de violon absolument génial, joué par la violoniste Rachel Hall, qui font de ce morceau un moment hypnotique presque intemporel que vous vous repasserez bon nombre de fois.
Après tout ça, il faut néanmoins le reconnaître, le vrai commandant de bord, celui par lequel la magie opère, c’est bel et bien Bjorn Strid, qui une nouvelle fois est absolument irréprochable. On commence à avoir l’habitude de l’entendre en faire des tonnes histoire de montrer qui c’est le patron, mais vu que ça continue de marcher et que le bougre à l’air de s’éclater là-dedans, il aurait tort de se priver. Surtout qu’il est maintenant soutenu par les choristes Anna-Mia Blonde et Anna Brygård, et que les quantités industrielles d’harmonies présentes sur « Aeromantic » contribuent à lui donner cette touche TOTO/ABBA qui lui donne tout son charme.
Évidemment, on peut lui trouver des défauts : moins hard rock que ses prédécesseurs, une batterie un peu en retrait, des riffs qui gagneraient à être un poil moins noyé dans le mix… Mais au final, cet album est une friandise, un moment de douceur, d’évasion et de plaisir dont j’avais clairement besoin en 2020. Et malgré ses petits défauts, j’y suis revenu encore et encore tout au long de l’année à tel point que je fus obligé de me soumettre et d’admettre que cet album défonce.
L’ultime niveau du plaisir total et décomplexé et un groupe qui continue son parcours sans faute, pour le meilleur et le too much.