C’est à l’âge de huit ans que Didier « Beubeu » Banon fait la rencontre de Gilbert « Motch » Valentin. A l’adolescence, le premier se dirige vers la batterie et le second décide de prendre la guitare. En 1977, ils forment OTH (pour « On Tenter Hooks », qu’on peut traduire par « sur des charbons ardents »). Ils recrutent un chanteur harmoniciste plus âgé qu’eux : Jean-Michel « Spirou » Poisson et les frères Patillon à la basse et la seconde guitare. Ces derniers seront remplacés quelques mois plus tard par Dominique « Domi » Villebrun (guitare) et Philippe « Phil » Messina (basse). Le line-up d’OTH ne bougera pas pendant les treize années qui suivront.
A cette époque, la région Montpelliéraine dispose d’un nombre hallucinant de groupes mais de trop peu d’équipement pour les accueillir. Motch raconte : « On répétait dans le garage de notre guitariste, parce qu’il n’y avait pas de locaux de répèt. Il y avait beaucoup de groupes, mais ils s’entraidaient beaucoup pour le matos ou pour trouver des locaux pour répéter. C’était assez facile. Il y avait une bonne entente entre les groupes ».
C’est à cette époque-là que Beubeu abandonne ses études pour se consacrer uniquement à son groupe. OTH se produit pour la première fois en 1978, gratuitement, sur l’esplanade de la comédie à Montpellier. Ce concert est décrit par Thierry Salert dans son livre « Insoumission Obligatoire : Le Rock Montpelliérain » de la façon suivante : « […] Un hard rock speedé au son diaboliquement sale. Le larsen vrille, on distingue à peine la voix du chanteur, rognée par une rythmique de panzer. Putain, on n’a jamais entendu un truc pareil. Habituellement, le hard rutile par trop aux entournures pour être réellement agressif. Mais ce cataclysme bordélique fait davantage penser au « Raw Power » Stoogien fraîchement découvert, qu’aux heavy rockers Bostoniens. Pourtant Motch peut faire penser à Joe Perry. Mais Spirou grimpe sur les colonnes de la maigre sono et éructe comme l’iguane. L’harmonica feule et sature. Les titres, étonnamment concis et rapides ne laissent que peu de place aux bravades instrumentales. […] Pour bon nombre d’entre nous, cette prestation tronquée est un véritable dépucelage auditif. Intense et frustrant. Les plus âgés affichent un sourire de contenance, tentant de paraître blasés. La basse fait vibrer l’estomac et les bras frissonnent, […] Cet après-midi aux abords anodins fut révélateur. Les commentaires allaient bon train, des superlatifs émerveillés aux vaseuses considérations de pseudo musicos. ON TENTER HOOKS […] faisait du BRUIT, avec la hargne d’un tigre à la diète. Ils allaient changer les choses, ils le devaient… »
Leur premier concert « officiel » a lieu un mois plus tard au Pavillon Populaire. Là encore, le carton est total et Spirou termine sur ces mots : « La musique va s’arrêter les lumières vont s’éteindre. Le silence nous fera comprendre que nous devons partir. On s’est vendu de l’illusion. On a fait semblant de s’aimer. Une heure avec vous c’était vraiment court quand on est tout seul dans la vie. Mais nous sommes déjà en route pour l’enfer ! ».
Ils enchainent ensuite les concerts en Espagne et en Allemagne, avant d’ouvrir pour le non moins culte groupe du Havre LITTLE BOB STORY. OTH impressionne tellement les Havrais que les deux groupes seront quasiment inséparables dans l’hexagone pendant très longtemps. La légende parle même d’un bœuf géant aux Folies Bergères, et certains affirment y avoir assisté. Pourtant malgré un succès public indéniable et un bouche à oreille plus qu’élogieux, lors qu’OTH se produit au Gibus, toute la presse spécialisée s’en fout, et Rock & Folk expédie la chose en moins de deux lignes.