Puisqu’apparemment, ce report est l’occasion de vous faire des confidences, sachez que ma première expérience avec le stoner rock fût « Songs For The Deaf » des QUEENS OF THE STONE AGE. Si vous suivez la radio, vous imaginez donc tout ce que cet album représente pour moi et à quel point je dois me faire violence pour ne pas trop attendre de ce soir, après la douche froide des FOO FIGHTERS il y a trois semaines.
Déjà, on a droit à un décor… étonnant. De longs tubes à LED plastiques posés à la verticale sur la scène forment un quadrillage dans lequel évoluent cinq musiciens à l’élégance remarquable (surtout Troy Van Leeuwen, dont je jalouse maintenant le costume). Retentissent alors les premières notes de « Regular John » puis « If I Had A Tail ». Un doute s’empare de votre serviteur. Car si d’entrée de jeu QOTSA enterre la concurrence, leur son a perdu beaucoup de son côté lourd et de son groove pourtant si génial. C’est avec « Feet Don’t Fail Me », dédié à DAMIAN MARLEY, qu’on comprend que ce choix est fait pour permettre aux extraits de « Villains », sorti l’an passé, de briller comme il se doit. Bon bah c’est réussi. Si l’album m’avait peu convaincu, à cause d’une trop grande inconstance et de ce son déroutant, ce soir le quintet me le ferait pratiquement reprendre depuis le début pour voir ce que j’ai loupé.
Grâce au jeu de batterie phénoménal de Jon Theodore (son solo sur « No One Knows », une tuerie), « The Evil Has Landed » trouve l’énergie qui lui manquait un peu et on se surprend à chantonner le riff en chœur. C’est Troy Van Leeuwen, qui donne la cadence à « The Way You Used To Do », et balance un riff dansant au possible, sur lequel son déhanché rappelle celui d’Elvis Presley. Il est d’ailleurs parfaitement épaulé par Michael Shuman, dont le touché est visiblement très apprécié par sa basse si on en juge à la série de ronronnement incroyablement efficaces qu’elle lui renvoi, sur un « Domesticated Animals » qui fait rouler de nombreux popotins. Derrière tout ça, Dean Fertita, dont les claviers oscillent entre années 70 et 80, est constamment à l’œuvre pour lier tous ces éléments entre eux, et permettre à Josh Homme d’apporter la touche finale à un édifice déjà remarquable. Car le chanteur, archétype du connard tellement cool et assumé qu’on en tombe amoureux en un sourire, est un showman exemplaire. Usant et abusant de son charme et de son timbre caractéristique, il est le parfait chanteur de groupe de rock : toutes les femmes veulent être avec lui et tous les hommes veulent être lui. Rien qu’à l’entendre sur « Make It With Chu », on a des petits frissons de plaisir.
Au-delà de tout ça, QUEENS OF THE STONE AGE reste une machine à tube et c’est exactement ce qu’on a pendant ces quatre-vingts minutes de concert. En piochant intelligemment dans l’ensemble de son répertoire, les américains mettent ainsi le feu au Main Square. « My God Is The Sun » dévoile leur côté glauque, « Monsters In The Parasol » et « Little Sister » font danser même les plus réticents à ce style, « Make It With Chu » est prétexte à tout le romantisme de l’univers, « 3’s And 7’s » est plus débridé que jamais…
Après quelque morceaux, plusieurs flashs et mouvements de spectateurs me font tourner la tête, je constate que les frères Duplantier sont à peine à deux mètres de moi et qu’ils kiffent tout autant la musique. S’ils sont toujours là à la fin, j’irais les remercier pour leur concert, pour l’instant laissons-les profiter. Surtout que « You Think I Ain’t Worth a Dollar, But I Feel Like a Millionaire » démarre, que ce titre retourne littéralement le festival, et me défonce le cou.
Plus le set avance, plus l’énergie monte et plus je me rends compte qu’ils sont entrain de dépasser mes attentes. On applaudit même quand Josh Homme envoie chier un spectateur qui tente de lui ordonner une chanson (« Je bosse pas pour toi alors va te faire foutre. Pauvre connard. »). Soudain tout s’arrête, le groupe, qui mouille la veste comme jamais et joue chaque note comme si sa vie en dépendait, reprend son souffle, Troy Van Leeuwen, joue un petit arpège, Shyanna se retourne avec un grand sourire. Et j’ai compris… « Go With The Flow » est lancée et mettra tout le monde au diapason. Tout le groupe y est à l’unisson, chacun mettant ses dernières forces dans ce titre incontournable et mythique qui achève un public qui n’en demandait pas tant.
Un dernier rappel avec « Songs For The Dead », prétexte à une petite « Overkill » (on reprend plusieurs fois le riff de la chanson avant de finir, histoire de terminer les plus coriaces) et c’est fini. QUEENS OF THE STONE AGE vainqueur par K.O. Un grand concert d’un grand groupe.