A l’époque, Johannes nous avait confié qu’après leur sortie éponyme AVATAR avait besoin d’évoluer, de sortir des chemins tracé par leurs débuts. A l’écoute de leur valse noire, on ne pouvait que hocher la tête et admirer la réussite : un mélange d’éléments de tous horizons, entre IN FLAMES, ALICE COOPER et RAMMSTEIN, truffé d’éléments catchy et mélodiques mais qui gardait une structure et une cohérence qui donnait l’impression de regarder un film…
Mais à partir de là, ou aller ? Tenter de reproduire la même recette ? Il n’y aurait eu aucune honte à cela, de nombreux grands groupes l’ont fait. Mais non il leur en fallait plus, il leur fallait une création absolue. Plus de puissance, plus d’énergie, plus de diversité… « Hail The Apocalypse » est une bombe infernale de colère et de dépit. Une analyse des dérives de notre monde et une annonce étrangement fataliste de la seule chose qui pourrait nous apporter la paix : la fin des temps.
L’énergie qui se dégage de l’ensemble de cet album est particulière, tantôt empreinte d’une rage noire et sourde (« Tsar Bomba », « Hail The Apocalypse ») tantôt pleine d’une mélancolie presque perverse (« Something In The Way ») et parvenant souvent à mélanger les deux (le sublimissime « Bloody Angel »). Et si ces montagnes russes sont déroutantes au premier abord, la cohérence dans le rendu reste bluffante, avec un Johannes absolument impérial dans son rôle de meneur, et un groupe entier qui sublime l’émotion jusqu’à la rendre aussi pure que violente.
Parce qu’en effet violence il y a, puisque si le clown riait d’une ironie presque nerveuse sur « Black Waltz », il a ici cessé de rire et se fait un miroir des vices et défauts de notre monde actuel pour un verdict sans appel : sous nos dehors propres, nos costumes et nos sourires se dévoile un monde sale, pervers, à la barbarie et la stupidité sans bornes, un simple compte-à-rebours menant à cette fin du monde que nous nous devons d’accueillir à bras ouverts.
Mais curieusement, au cœur de ce message, se trouve de la douceur, de la délicatesse même. Dans une alternance aussi paradoxale que superbe, AVATAR nous offre une mélodie continue (qu’un monsieur comme DEVIN TOWNSEND ne renierait pas) qui apaise autant qu’elle dérange (le glauque « Something In The Way », excellente reprise de NIRVANA, et le sexuellement languissant « Tower »). C’est ce contraste qui fait passer l’album de la case « excellent » à la case « parfait ».
Si l’on ajoute à cela une composition parfaitement maitrisée qui témoigne d’un investissement complet de chacun des membres du groupe, qui met en valeur les points forts des cinq musiciens et qui ne recule devant rien pour diversifier le propos sans jamais perdre l’auditeur, alors on obtient l’un des albums phares de l’année 2014, une perle rare, symbole de l’explosion créatrice d’un groupe dont l’univers musical enveloppe l’auditeur et l’attire toujours plus profondément dans sa folie.
« Hail The Apocalypse »? Non ! Hail AVATAR.