Le riff de « Get Lifted », entêtant et envoutant, est la parfaite démonstration du talent de bassiste d’Ozo. Celui-ci possède un toucher fin et délicat de plus en plus appuyé au fil du morceau pour devenir un mur sonore impénétrable. C’est sur « Prophet » que Dango montre une maitrise absolue de ses pédales et de ses effets, imposant à l’auditeur une expérience unique et un panel de couleurs aussi riche que magnifique. Et Poncho, s’il n’est finalement que très peu mis en avant, c’est sur « Mindcontrol » que le côté élégant et très aérien de sa frappe marque immédiatement les esprits.
C’est là qu’intervient la seconde étape du cocktail. Car si un B52 bien fait est agréable à regarder, c’est lorsqu’on le boit et que l’on mélange les ingrédients qu’il prend tout son sens. Et c’est la force de TRUCKFIGHTERS : ils sont bien plus que la somme de leurs individualités. Ainsi si la guitare et la batterie semblent sur deux plans différents, tout devient magique lorsqu’elles sont liées par la basse et le chant, devenant un tout qui dévoile l’univers des suédois. Il est très rare qu’un disque soit aéré par sa batterie, mais le contraste entre la lourdeur de la basse, le fuzz émanant de la guitare et la délicatesse de la batterie donne l’impression que Poncho survole ses deux compères et offre une bouffée d’oxygène à son auditoire, aidé pour cela par la voix d’Ozo, toujours aussi magnifique.
Sur le même modèle, chaque morceau de « Universe » est construit pour parfaitement compléter les autres, si bien que l’on a le sentiment d’être en face d’une longue pièce de 40 minutes. Prenez par exemple l’enchainement « Chairman »/« Prophet ». Si ils sont construit apparemment de façon similaire : couplet aérien/refrain puissant et fuzzy à mort, ce sont deux titres fondamentalement différents. « Chairman » est axé sur la progression du morceau, alors que « Prophet » est centré sur l’alternance entre les éléments qui le composent. Ce sont ces petites différences qui marquent et affirment leur talent de compositeurs. Mais la pièce la plus impressionnante de l’album reste le final : « Mastodont ». Ce morceau fait presque 14 minutes mais ne donne jamais l’impression d’être long. C’est comme si toutes les notes étaient finalement là pour nous porter et nous laisser admirer la mélodie qu’elles peignent pour nous. En plus, l’idée de faire évoluer ce morceau d’un rythme lent à un mid-tempo dévastateur permet de clôturer ce chef d’œuvre de la meilleure façon qui soit, en donnant immédiatement envie de le réécouter.
En conclusion, TRUCKFIGHTERS vient juste de déboiter la concurrence en ouvrant l’année par une sortie exceptionnelle. Tout, depuis l’écriture jusqu’à la production (que le groupe a entièrement réalisée) et au mixage est parfaitement maitrisée. Chaque morceau est une invitation au zen et à la détente. Chaque minute de cette œuvre est un pur plaisir. Chaque note est une réussite absolue. Un putain de groupe culte à découvrir d’urgence je vous dis.