RED FANG fait du stoner. Mais pas que. Un stoner groovy, mâtiné de heavy metal, de rock, d’un brin de hardcore et de grunge. Le groupe de portland propose un genre unique qui sonne comme tout et rien à la fois. Avec une particularité : on retrouve deux chanteurs qui se partagent le micro (fait finalement très rare pour un groupe affilié stoner). Le contraste entre les deux voix, est aussi saisissant qu’efficace : le passage de la voix rocailleuse de Bryan Giles sur « Malverde » à celle d’Aaron Beam sur « Wires » permet d’entretenir la diversité dans les morceaux et donc d’éviter la lassitude qui peut provenir de l’une ou l’autre des voix.
Autre point magistral : les riffs. Si cela était un art perdu ces deux dernières années, RED FANG mérite son doctorat en archéologie avec les félicitations du jury. Chaque plan de guitare est d’une simplicité crasse, mais transpire et l’efficacité : le riff de « Wires » te reste dans la tête, « Dirt Wizard » est à proscrire à proximité des radars, « Hank Is Dead » suinte la puissance brute de la route américaine, « Number Thirteen » est emplie d’un groove continu et tout bonnement jouissif. La complémentarité des guitares est aussi à saluer, aucune ne prenant le pas sur l’autre pour un mur sonore que l’on ne peut pas éviter.
John Sherman lui aussi se fait plaisir derrière sa batterie, armé d’un jeu lourd et hyper fluide qui renforce à la fois la puissance du groupe (le bougre cogne comme si sa vie en dépendait) et le coté jam que l’on retrouve dans les compos : essayez de ne pas taper du pied en rythme sur « Human Herd ». Il n’hésite d’ailleurs pas à proposer de multiples cassures de rythme, faisant alors reposer l’ensemble sur la basse hyper fluide et groove du sieur Beam (sur un casque de merde, je l’entendais pas, j’en ai changé, et ma vision du disque a totalement changé).
Les titres s’enchainent de manière totalement fluide, sans aucun temps mort. Chaque chanson est une brique qui solidifie la montagne de son produite par le combo. On passe d’un morceau à l’autre de façon totalement naturelle, en se disant « okay, celle là à assez durée, maintenant la suite ». Même si on reprochera à la première partie du disque (jusqu’à « Dirt Wizard » en fait) d’être beaucoup plus facile d’accès que la seconde moitié, plus sombre, l’ensemble fait preuve d’une remarquable unité.
Pour ce qui est des reproches, je ne vois guère que la prod, parfois un peu lourde (« Throw Up ») ou le morceau « The Undertow » qui est un poil en deçà du reste et la fin de « Human Herd » peut être trop brutale. Ajoutez à cela une légère difficulté d’accès sur les deux trois premières écoutes et un coté beaucoup plus sombre que sur leur précédent album qui rebutera certainement certains d’entre vous. Comme quoi il est toujours bon de se fier à son instinct, et pas à un élitisme idiot. RED FANG, mea culpa… Vais m’en jeter une petite pour me faire pardonner du coup. N’hésitez pas à regarder les clips vidéos du groupe. C’est tordant. Mais vraiment vraiment tordant.