Les parties de guitare, planantes à souhait grâce à l’utilisation quasi-continue du delay et de la reverb viennent alléger l’ensemble, en le rendant aérien et planant, du début à la fin. On a l’impression d’écouter un jam tant les guitares semblent se construire en même temps que la basse. Les riffs sont simples, minimalistes parfois, mais jamais totalement basiques. Ne vous attendez pas à du mathcore hyper-technique, ici on est au royaume du riff qui tue, de l’enchainement qui marque par sa fluidité et sa quasi-nonchalance.
Parlons aussi des morceaux. Curieusement pour un groupe évoluant dans ce style, SUNGRAZER excelle dans les chansons « longues » (« Sea » et ses 8 minutes ou l’excellent « Behind » de pratiquement 14 minutes quand même) qui lui laisse le temps de poser ses ambiances ethérées. Le psychédélisme du groupe n’est pas tant dans la surenchère d’effet tous plus tordus les uns que les autres mais vraiment dans cette volonté de se reposer sur les ambiances, sur le calme et le silence. Et ça marche : les hollandais proposent une musique envoutante, reposante dont les effets apaisants sont loin d’être négligeables. Ce d’autant que l’alliance des deux voix, qui sont constamment ensemble, renforce cette impression. Les montées en puissance sont maitrisées et jamais assourdissantes, mais elles sont un prolongement logique des morceaux (« Wild Goose » sérieusement, c’est puissant mais ça reste étrangement délicat non ?).
Le trio maitrise son propos de A à Z et ne se laisse jamais emporter dans la surenchère d’effet, la surpuissance, ou la lenteur extrême. Tout y est un savant mélange, insistant sur chacun des points quand c’est nécessaire. Chaque chanson est unique, mais complète les autres. « Wild Goose » et son rythme entêtant, « Sea » et ses ambiances lourdes mais jamais trop oppressante, « Behind » tout en légèreté et en subtilité, « Mirador » et son utilisation continue du delay qui reste jouissive tout au long du morceau, et enfin « 34 & More » qui vient conclure l’album sur une touche d’absolue légèreté.
Malheureusement, il y a une ombre au tableau. Car au milieu de cet océan de subtilité, de cet univers unique que distille le groupe, les deux morceaux que sont « Octo » et « Goldstrike » donnent dans un stoner beaucoup plus classique, qui sans être mauvais n’ont pas réellement la saveur des autres et cassent un peu le rythme du début d’album. Heureusement, ils arrivent tous les deux assez vite, et sont éclipsés par le reste assez facilement.
En définitive, SUNGRAZER propose un univers psychédélique des plus rafraîchissants et sait ce qu’il fait. L’album est très bon, chaque écoute révèle des surprises, l’ensemble des titres s’enchaînent plutôt bien malgré quelques faux-pas. Le voyage proposé est ainsi magnifiquement maitrisé dans un disque dont on ressort étrangement calme et détendu. Un tout petit effort et ce groupe pourrait devenir l’un des meilleurs représentants d’un stoner en mutation continue, de par son originalité et sa maturité impressionnante. Pas parfait, mais très très agréable.